François René de Chateaubriand
'C'était un épicurien qui avait l'imagination catholique.' Sainte-Beuve
'Grand artiste et non
pas grand homme, immense talent mais plus immense orgueil, dévoré d'ambition,
mais n'ayant trouvé à aimer et à admirer dans le monde que sa personne,
infatigable au travail, capable de tout, sauf de dévouement réel, d'abnégation
et de foi. Jaloux de tout succès, il a toujours été de l'opposition, pour renier
tout service reçu ou toute gloire autre que la sienne.' -
Henri-Fréderic Amiel, Fragments d'un
journal intime. François-René Chateaubriand est né à
Délaissé par ses parents et abandonné aux domestiques, Chateaubriand regarde déjà, face à la mer, songeur et fiévreux, les ouragans, la colère du ciel et les horizons perdus. Adolescent à la fois charmeur et rebelle, 'il noue des relations faciles avec les sciences et les arts'. Hésitant entre l'Eglise et la marine, il renonce finalement aux deux.
La révolution de 1789 l'incite à voyager en Amérique, d'où il reviendra les yeux émerveillés d'une nature encore vierge (Les chutes du Niagara, le Mississippi ) et les carnets noircis de notes qu'il utilisera notamment dans Atala, Les Natchez, Voyage en Amérique.
De retour en France, il souhaite se mettre au service de la monarchie menacée. Blessé au siège de Thionville, il se réfugie à Jersey, puis en Angleterre. Bouleversé par la mort de sa mère et de sa sour, Chateaubriand est touché par la grace. Il écrit le Génie du Christianisme. Sa vie sera alors consacré à la littérature et à la politique.
En 1800, il revient en France, prêt à conquérir Paris : 'j'abordais la France avec le siècle'. Chateaubriand parvient à s'immiscer dans l'entourage de Bonaparte qui a de l'estime pour lui. Il est nommé secrétaire d'ambassade à Rome. Mais suite à l'assassinat du duc d'Enghien, Chateaubriand prend ses distances avec celui qui est devenu Napoléon 1er. Il reprend une 'vie privée' et se remet à l'écriture. Il entreprend alors son second grand voyage, le voyage d'Orient. De toutes les lumières et de tous les souvenirs qu'il ramène de Grèce, de Turquie, d'Egypte, d'Afrique du Nord et d'Espagne, il fera plus tard l'Itinéraire de Paris à Jérusalem, les Martyrs, et Le Dernier Abencérage.
De retour à Paris, Il achète une maison, la Vallée aux loups, aux environs de Paris; résidence qui lui permet d'échapper au courroux de l'empereur. Il décide de commencer, ce qui sera la grande ouvre de sa vie, Les mémoires d'Outre Tombe. Il se consacrera pendant plus de trente ans à la rédaction de ce chef d'ouvre qui ne sera publié qu'après sa mort.
Jean d'Ormesson, dans sa passionnante Histoire de la littérature française dépeint ainsi l'auteur du Génie du Christianisme et des mémoires d'Outre Tombe : 'Chateaubriand est à cheval sur deux siècles, et en vérité sur deux mondes : le dix-huitième et le dix-neuvième, le libertinage et la passion, l'age des lumières et le romantisme. Il a vingt-cinq ans quand éclate la terreur . Stendhal a dix ans et Lamartine trois ans. Vigny n'est pas encore né . Hugo non plus, bien sûr. La révolution romantique sera entreprise par un conservateur d'Ancien régime, fidèle à la monarchie légitime et à la religion catholique, attaché à la tradition. Ce n'est pas le seul paradoxe d'un écrivain dominé par la contradiction. Il fera profession de mépriser les honneurs et il les recherchera, et les obtiendra toute sa vie. Il sera à la fois le défenseur véhément de la liberté de la presse et un ultra convaincu. Il sera un chrétien authentique, un catholique soumis, et l'adultère et les femmes tiendront dans son existence une place considérable.'
Lucile, sa sour tant aimée, Charlotte Ives, Céleste Buisson de la Vigne, son épouse, Pauline de Beaumont, Delphine de Custine, Natalie de Noailles, Cordélia de Castellane, Juliette Récamier : les femmes qui ont compté dans la vie de Chateaubriand ne tiendraient pas toutes sur le carnet de Don Giovanni, tant elles sont nombreuses.